Initiative de réappropriation climatique

Étiquette : biodiversité

Sans oiseaux, les plantes vont-elles continuer à pousser ?

Il y a quelque temps, le biologiste Ernst Zürcher (Forêts aux éditions La Relève et la Peste, 2022) interrogeait le fait que certains arboriculteurs utilisent la diffusion de chants d’oiseaux pour stimuler la croissance des arbres. Cet engrais acoustique, comme il le nomme, provient de l’effet de certaines fréquences sur l’ouverture des stomates (l’organe qui permet les échanges gazeux). Ce phénomène, lié au calcium, est décrit dans une étude de l’université de San Diego parue dans science en 2000 (Alteration of Stimulus-Specific Guard Cell Calcium Oscillations and Stomatal Closing in Arabidopsis det3 Mutant) [1].

Il est aussi établi que la musique (classique) a un effet positif sur la germination des graines de laitues. Aujourd’hui, une étude australienne montre qu’on peut multiplier par cinq le rythme de croissance des champignons mycorhiziens en les soumettant en permanence à un son de 8khz et 80 db. Or la bibliographie abonde pour mettre en évidence le rôle fondamental des mycorhizes sur la croissance et la santé des plantes 

Que faut-il en conclure ?

Vous trouverez beaucoup de références à ces études, toujours présentées positivement, comme un émerveillement sur la grandeur du vivant, par des articles qui ont l’ambition de donner envie aux lecteurs d’aimer la nature, de la protéger, de la comprendre, voire d’appréhender son aspect vibratoire.

Mais plus prosaïquement, on pourrait se dire que la chute des populations d’oiseaux et les impacts de la pollutions sonores anthropiques qui les contraint à modifier leurs chants (hifting song frequencies in response to anthropogenic noise: a meta-analysis on birds and anurans), le bouleversement de l’espace sonore, a des conséquences sur le monde végétal qu’il est difficile d’estimer.  On a souvent entendu que, sans abeilles, l’humanité mourrait de faim. Se pourrait-il que sans oiseaux, elle meurt de chaud ?

Le projet de l’autoroute de la pluie et ses 40 arbres par hectare, c’est aussi des perchoirs, des endroits pour nicher, un pied dans la porte pour redonner sa chance au vivant.

L‘image provient de Wikipedia.

59 % de la vie dans le sol

Dans un article d’août 2023, sous la direction de  l’écologue Mark Anthony (Enumerating soil biodiversity https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2304663120), les chercheurs ont pu déterminer que la plus grosse partie de la vie sur terre ne réside ni dans les forêts, ni dans les océans, mais dans les sols. Cette étude en complète une de 2018 sur la distribution de la biomasse terrestre (The biomass distribution on Earth https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1711842115). Étude qui montrait, au passage, que la biomasse de la terre avait décliné de 50 % depuis le début de la civilisation humaine.

Photo de Oliver Meckes et Nicole Ottawa, National Geographic

Ici, dans ce débris végétal, on observe un ver polychète et deux espèces d’acariens, des mousses et des champignons. Leur existence, leur action mais aussi leurs excréments et leurs cadavres vont contribuer à aggrader le sol, favoriser la croissance des plantes et développer l’écosystème. Prendre soin des sols, c’est construire la biodiversité.  

Quand on parle de biodiversité, on pense souvent à la faune en danger : ours polaires sans banquise, orang-outan sans forêts, migration des gnous bloquée par l’autoroute … etc. Mais la majorité du vivant est constitué de petites choses, bactéries, amibes, protozoaires, champignons, acariens, collemboles, nématodes, radicelles, mycorhizes, que l’on trouve dans le sol.

➖ les sols sont artificialisés 🅿️ 🛣️ : un sol c’est avec des plantes  ☘️ dessus et de l’eau 🚰 dedans. Autant de propriétés qu’on enlève avec le revêtement et le drainage. Sans plantes, sans eau, pas de matière organique ni de sucre pour nourrir le vivant. 

➖ les sols sont compactés 🚛 🚜 🦖: à force de rouler dessus avec des engins de plusieurs tonnes, de les retourner dans tous les sens, d’enlever les cailloux, de désherber, de terrasser, de minéraliser la matière organique, la porosité, c’est à dire la capacité à faire circuler de l’air, de l’eau, du mycélium et des racines, disparaît et avec elle, la vie.

➖ les sols sont pollués : entre les déchets industriels, les poubelles, le plastique issu des pneus, les dépôts de particules  et l’épandage de produits, la vie dans les sols est soumise à rude épreuve. Situation d’autant plus dommageable qu’elle est inextricable. La pollution qui n’est pas fixée dans les sols part dans l’eau ou dans l’atmosphère. 

➖ les sols sont érodés : en perdant leur vie, en brûlant au soleil, les sols perdent leur cohérence et leur structure et finalement sont emportés par la pluie et le vent.

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