Initiative de réappropriation climatique

Étiquette : agroécologie

Comprendre la syntropie 1 : le jardin tropical

Dès le 16ème siècle, l’exubérance de la flore tropicale a pour les Européens quelque chose du jardin d’Eden ; une image du paradis terrestre qu’on retrouve dans quantité d’œuvres : les voyages de Bougainville, Paul et Virginie, les jungles du Douanier Rousseau. Cette image d’une nature idéale cristallise les regrets d’une société marquée dès le 18ème par l’exode rural et le colonialisme. Au 19ème, les palmiers chanvres arrivent devant les fermes du Sud-Ouest. Ils sont ramenés par les jeunes gens qui vont faire leurs 5 années de service outre-mer. Au 20ème siècle, les pavillons coloniaux, la démocratisation de la banane, du café et du chocolat finiront par consolider cette image d’abondance.

Pour ceux qui s’y installent, souvent issus de territoires pauvres, où on s’échine à valoriser des sols trop maigres, trop caillouteux ou des saisons trop courtes, la croissance des plantes en zone tropicale humide a quelque chose d’indécent. Ils feront de ce potentiel un pilier de la prospérité Européenne [Etemad Bouda, De l’utilité des empires. Colonisation et prospérité de l’Europe, XVIe-XXe siècles].

Pourtant, tout a leur fascination, ils passent complètement à côté de l’essentiel. L’Amazonie du 16ème siècle n’est pas une forêt vierge [Stéphen Rostain, La forêt vierge d’Amazonie n’existe pas, éditions Le Pommier, 2021], mais un véritable jardin tropical hébergeant jusqu’à 10 millions d’habitants [fouilles menées par Mamirauá Institute for Sustainable Development et l’archéologue Rafael Lopes de l’université de Sao Paulo] sur les 50 à 80 millions que compte l’Amérique à l’arrivée des colons [Earth system impacts of the European arrival and Great Dying in the Americas after 1492]. Les indigènes aussi sont des cultivateurs. Il existe une façon de faire de l’agriculture qui échappe à l’appréhension des Européens et de leurs descendants.

Contrairement au champ, qui est une simplification drastique, un effacement de l’écosystème préexistant, l’agroforêt tropicale compose avec la complexité et la dynamique du vivant. Pour Ernst Götsch, chercheur et cultivateur agroforestier au Brésil, cette opposition confronte l’ordre à l’intérieur du vivant au chaos des systèmes physiques. La vie est alors caractérisée par une entropie négative. Erwin Schrödinger (celui du chat 🐈‍) dans son ouvrage “Qu’est-ce que la vie ?” parlera à ce propos de néguentropie. Le mathématicien italien Luigi Fantappiè dans une tentative de regrouper physique et biologie, inventera, lui, le terme de syntropie.

Dans cette perspective en première approximation, si on considère qu’à compter du 16ème siècle, l’Europe a exporté sa façon de concevoir la production végétale, l’agriculture syntropique pourrait être une tentative d’initier un mouvement inverse.

L’agroforesterie en bande dessinée de Lotufo & Trevelin (2019, disponible en ligne) donne une première image du sujet.

Transition agroécologique au XVIIeme siècle

Transition agroécologique en l’an 1600 (ou comment ne pas passer la charrue avant les bœufs ou quand on cherche des solutions on en trouve – suivez mon regard).

Image, Mûrier de Sully, Villes-sur-Auzon 
https://krapooarboricole.files.wordpress.com/2011/09/mc3bbrier-de-sully-7.jpg?w=290

En 1598, lorsque Henri IV promulgue l’édit de Nantes, la France sort de 35 ans de guerres de religion, pestes et famines. Le pays est exsangue.

Pour relancer l’économie rurale, Henri IV et son ministre Sully s’appuient sur l’œuvre de l’agronome Olivier de Serres.

Son œuvre principale, Le théâtre d’agriculture et mesnage des champs, publiée en 1600, transforme profondément l’assolement triennal pratiqué jusqu’alors.

A cette époque, on plante une céréale d’hiver (du blé), puis une céréale d’été (du seigle), avant de  laisser le champ reposer un an ou deux en vaine pâture. 

Le génie d’Olivier de Serre est d’allonger cette rotation en introduisant en tête de rotation une culture de printemps (betterave, maïs, pomme de terre) et de remplacer la jachère par une prairie temporaire de luzerne. La rotation devient  : culture de printemps souvent sarclée, suivie d’une céréale d’hiver puis d’une céréale d’été. Puis trois ou quatre ans de luzerne pâturée avant de recommencer. 

Avec la luzerne, on nourrit des vaches et des lapins, avec le maïs des volailles, avec les patates, des cochons. Ce nouvel équilibre entre production végétale et animale favorise la fertilité des sols et la prospérité des fermes. On passe d’un élevage marginal, souvent limité aux bêtes de somme, à une production alimentaire régulière. La fameuse poule au pot. 

Olivier de Serres introduit un troisième élément dans l’équation : des cultures de plantes pérennes destinées au commerce. Vigne, houblon, fruits secs, oliviers et surtout le mûrier. C’est en effet à lui qu’on doit l’introduction du ver à soie dans le sud de la France. Il fait paraître en 1599 La cueillete de la soye par la nourriture des Vers qui la font. Pour lui, cultures de vente, cultures vivrières et élevage doivent avoir une part égale dans l’économie de la ferme.

Ainsi par exemple, les Cévennes protestantes deviennent la base arrière de la très florissante industrie de la soie lyonnaise. Ainsi la vallée d’Agen se couvre de pruniers… 

Le 17e Siècle reste une période très difficile pour les populations, mais si un siècle plus tard la France connaît une explosion démographique malgré un réchauffement qui tarde à venir,  c’est sans doute en partie parce que les bases de la polyculture / élevage qui ont été posées alors permettent une meilleure santé des fermes.

Pour approfondir : 

📗 Olivier de Serres par Henri Gourdin chez Acte Sud 
📙  Le théâtre d’agriculture disponible en édition originale sur :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k52175n/f2.item

Techniques de plantation

Il y a 4 façons d’avoir des arbres

1 – planter 

Pour faire pousser des arbres, on pense d’abord à les planter. Pourtant sauf si on souhaite avoir une production précoce et standardisée, ce geste coûteux n’est pas toujours optimal.

On dit souvent que, dans un projet de plantation, il faut mettre l’argent dans la plantation plutôt que dans les arbres. La plantation nécessite un travail important :

🚜 Décompacter le sol pour que l’arbre s’ancre profondément et trouve des ressources en eau

🌿 Pailler pour limiter la concurrence des graminées durant les premières années

🍂 Amender pour stimuler la croissance 

💦 Arroser à la plantation et durant les premiers étés

🌬️ Tutorer pour éviter les cassures au point de greffe 

🦌 Protéger des brouteurs de bourgeons apicaux

Finalement :

 👉 planter demande du temps et de l’argent 

 👉 ça permet d’avoir les arbres que l’on souhaite, notamment pour la productions

2 – la RNA

Plutôt que planter, on peut laisser pousser. C’est ce que l’on appelle la Régénération Naturelle Assistée. On profite de la succession végétale pour que des arbres poussent.


Dans le ce cadre pour avoir des arbres il suffit de : 

🚧 protéger l’espace qu’on veut boiser des brouteurs et de l’épareuse

🔎 choisir les arbres qu’on souhaite laisser pousser 

La RNA : 

👉  un processus naturel qui permet d’avoir un peuplement endogène et adapté

👉  on ne choisit pas les arbres. On prend ce qui pousse

3 – le semi

Autre alternative à la plantation, le semi permet de choisir son peuplement en ayant une qualité d’enracinement similaire à la végétation spontanée. 

Mais les plantes ligneuses sont difficiles à semer car leurs graines ont des mécanismes de dormance difficiles à lever. Souvent il faut qu’elles passent par un épisode de gel ou le tube digestif d’un animal. Pour simuler ces phénomènes on utilise diverses techniques de stratification. 

👉 semer des arbres permet une grande diversité génétique 

👉 mais mis à part sur quelques variétés forestières, la réussite du semi reste aléatoire

4 – la bouture en place

D’après Francis Hallé, l’avantage de la plante sur l’animal c’est que si on la coupe en deux, on a deux plantes alors qu’un animal coupé en deux a un destin bien moins enviable. Le bouturage de branches ou de racine en place ne fonctionne pas avec toutes les espèces, mais sa simplicité en fait un candidat de choix pour une végétalisation rapide.

La bouture à grande profondeur permet de gérer la concurrence avec la strate herbacée et d’aller chercher l’eau.

👉 la bouture permet de multiplier les arbres en grandes quantités 

👉 elle ne fonctionne pas avec toutes les espèces

Nous suivons actuellement avec beaucoup d’intérêt des essais de bouturage en place au Karcher. Ils permettent d’atteindre une profondeur de plusieurs mètres très facilement et d’utiliser le matériel végétal issu de l’élagage. Au delà des classiques saules et peupliers, des essais sont en cours sur le platane, le tilleul, le mûrier blanc, l’olivier, le noyer et le châtaignier.

Cette vidéo illustre ce procédé:
https://www.youtube.com/shorts/rflXkhOg9NU?si=HEpLP8m5aQ8zGKlL

Sans oiseaux, les plantes vont-elles continuer à pousser ?

Il y a quelque temps, le biologiste Ernst Zürcher (Forêts aux éditions La Relève et la Peste, 2022) interrogeait le fait que certains arboriculteurs utilisent la diffusion de chants d’oiseaux pour stimuler la croissance des arbres. Cet engrais acoustique, comme il le nomme, provient de l’effet de certaines fréquences sur l’ouverture des stomates (l’organe qui permet les échanges gazeux). Ce phénomène, lié au calcium, est décrit dans une étude de l’université de San Diego parue dans science en 2000 (Alteration of Stimulus-Specific Guard Cell Calcium Oscillations and Stomatal Closing in Arabidopsis det3 Mutant) [1].

Il est aussi établi que la musique (classique) a un effet positif sur la germination des graines de laitues. Aujourd’hui, une étude australienne montre qu’on peut multiplier par cinq le rythme de croissance des champignons mycorhiziens en les soumettant en permanence à un son de 8khz et 80 db. Or la bibliographie abonde pour mettre en évidence le rôle fondamental des mycorhizes sur la croissance et la santé des plantes 

Que faut-il en conclure ?

Vous trouverez beaucoup de références à ces études, toujours présentées positivement, comme un émerveillement sur la grandeur du vivant, par des articles qui ont l’ambition de donner envie aux lecteurs d’aimer la nature, de la protéger, de la comprendre, voire d’appréhender son aspect vibratoire.

Mais plus prosaïquement, on pourrait se dire que la chute des populations d’oiseaux et les impacts de la pollutions sonores anthropiques qui les contraint à modifier leurs chants (hifting song frequencies in response to anthropogenic noise: a meta-analysis on birds and anurans), le bouleversement de l’espace sonore, a des conséquences sur le monde végétal qu’il est difficile d’estimer.  On a souvent entendu que, sans abeilles, l’humanité mourrait de faim. Se pourrait-il que sans oiseaux, elle meurt de chaud ?

Le projet de l’autoroute de la pluie et ses 40 arbres par hectare, c’est aussi des perchoirs, des endroits pour nicher, un pied dans la porte pour redonner sa chance au vivant.

L‘image provient de Wikipedia.

Agroécologie, la Suisse n’en fait pas tout un fromage

Dans une conférence sur la compaction donnée en décembre 2023 au Centre National d’agroécologie, Lionel Mesnage ne tarissait pas d’éloges sur l’avance de la Suisse en matière de pratiques agricoles. Encore une fois et sans surprise, cela est lié à quelques décisions politiques judicieuses, prises au bon moment.

Dans les années 80 les États décident, au travers de l’OMC, de l’ouverture des marchés agricoles. Cette ouverture se fait principalement au profit des agricultures européennes et américaines, largement subventionnées. Au même moment, la Nouvelle-Zélande prend le contrepied avec l’abolition totale des subventions en 1984, dans le cadre des réformes de la Rogernomics, accompagnée d’une déréglementation quasi totale et d’un coût social exorbitant (When the Farm Gates Opened: The impact of Rogernomics on rural New Zealand Broché – Neal Wallace).

Il faut attendre 1992 et le Sommet de la Terre de Rio, pour qu’un large consensus émerge sur la nécessité de soutenir financièrement les agriculteurs en anticipation de la baisse des prix agricoles dans des marchés libéralisés. 

Si, dans l’Union Européenne cela conforte la PAC, la très protectionniste Suisse prend un chemin un peu différent. Contrainte par l’OMC d’ouvrir ses marchés, la Suisse abandonne la politique de “subventionnement et de prise en charge garantie de la production” et décide d’établir sa politique agricole autour de trois objectifs : 

🧀 produire durablement 

🦋 entretenir le paysage rural

🇨🇭 occuper tout le territoire

Cela se concrétise par des paiements soumis à la réalisation des Prestations Écologiques Requises (PER) [voir agripedia et voir Office fédéral suisse de l’agriculture] qui comporte une quinzaine d’exigences  mais aussi par le financement de la formation, de la recherche participative, et de projets ciblés. Mais c’est surtout, la constitution de réseaux écologiques et paysagers sur de petits territoires qu’il faut retenir. 

Car, au-delà des points techniques, ce qui permet à la Suisse d’avancer bien plus vite que ses grands voisins dans le cadre de l’agroécologie, c’est sans doute l’échelle à laquelle sont prises et appliquées les décisions.

Illustration tirée de l’album “Les douze travaux d’Astérix”, l’enfer administratif de la maison qui rend fou, illustre bien la complexité de la PAC européenne en regard des 20 pages du PER Suisse.

En agroécologie, la croissance c’est les plantes !

Dans un post précédent, nous avons vu que l’un des deux marqueurs d’une transition agroécologique est la capacité d’un système à fonctionner avec de moins en moins d’interventions, autrement dit de moins en moins d’apports énergétiques : l’autonomie.

Idéalement, un agroécosystème ne consomme qu’une partie de l’énergie qu’il capte par la photosynthèse et stocke le reste sous forme de matière organique et de sucres.

Or, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, l’indicateur de vitalité économique est fondé sur la croissance du PIB. Cela pose deux problèmes :  

💡 La croissance est une fonction exponentielle. L’effort nécessaire pour faire  1%  de croissance annuelle double 2 fois en 200 ans. Celui pour 3 % double 7 fois. A 10 %, c’est 24 fois.

💡 Selon la façon dont est calculé le PIB (PIB = Dépense de consommation finale  + Formation brute de capital + Exportations – Importations), les activités de négoce, de finance et le déstockage peuvent avoir un rôle plus important que la production.

Mais le point qui pose surtout question, c’est la corrélation qui existe entre le PIB et la consommation d’énergie, en particulier fossile (voir à ce propos l’illustration de l’article du shift project). Cette idée se retrouve dans l’identité dite de Kaya (formulée par l’économiste Yoichi Kaya en 1993) qui permet d’exprimer l’intensité carbone du PIB.


Concrètement, installer 1 Mwh de panneaux photovoltaïques va fabriquer plus de PIB que de planter 1 Mwh de Miscanthus. C’est évidemment un problème pour l’agroécologie. Selon les termes de la comptabilité nationale, la biodiversité, la durabilité, l’aggradation des écosystèmes, la contribution au climat et à l’eau propre n’ont pas de valeur. 

Est-ce que cet effet comptable est une cause ou une conséquence ? Les tenants d’une comptabilité écologique pensent qu’il faut intégrer le poids du prélèvement sur les écosystèmes dans notre système comptable.

Ainsi Harold Levrelet  Antoine Misseme  dans “L’économie face à la nature. De la prédation à la coévolution”, élaborent la notion de dette écologique. 

D’autres estiment que cet aspect comptable n’est que le reflet d’un système de production  fondamentalement prédateur (voir par exemple “extractivisme, Exploitation industrielle de la nature : logiques, conséquences, résistances” de Anna Bednik). Les deux approches n’étant d’ailleurs pas forcément contradictoires. 

Notre but ici n’est pas de trancher cette question, mais simplement de montrer que la croissance telle qu’elle s’envisage aujourd’hui dans ses modalités et dans son rôle est un obstacle majeur au développement de l’agroécologie.

Définir l’agroécologie

Qu’est-ce que l’agroécologie ?

Dans notre post sur la Grande muraille verte, nous avons vu comment la plantation d’arbres a été remplacée par la régénération naturelle. Cette substitution est l’exemple typique d’une mutation agroécologique.

L’agroécologie est apparue dans les années 70 en Amérique latine chez des fermiers qui cherchaient une alternative à l’agronomie de la révolution verte. Elle est formalisée une première fois en 1983 dans 📗 “L’agroécologie – Bases scientifiques d’une agriculture alternative” de l’universitaire Miguel Angel Altieri.

Ce livre, qui éclaire les savoirs paysans traditionnels à l’aune des connaissances modernes en écologie appliquée, prône d’emblée une approche systémique. La production agricole n’est plus un processus industriel linéaire mais un système cyclique dont on exporte l’excédent. Ce qui amènera Charles A Francis à définir l’agroécologie comme l’écologie des systèmes alimentaires.

Si du point de vue scientifique, le concept est parfaitement défini, du point de vue technique et politique c’est beaucoup moins clair. En général l’agroécologie est confondue avec la Bio.

La définition du Ministère de l’Agriculture français est d’ailleurs assez proche des objectifs de la Bio telle que définie dans la législation européenne.

Mais la réalité du Bio est bien plus diverse que ses intentions. Pour aborder cette question, nous recommandons cette intervention de Mulet François, fondateur du réseau Maraîchage Sur Sol Vivant, certes polémique mais qui a le mérite de poser le débat.

De plus, si l’agriculture se met à produire massivement des matériaux, de l’énergie et, comme nous le souhaitons, de l’eau propre, du climat, si les villes prennent leur part, une définition de l’agroécologie qui aille au-delà de la question alimentaire nous semble nécessaire.

En apportant un soin particulier aux espèces végétales dans leurs diversités, leurs omniprésence et le cortège de leurs compagnons (la biodiversité), l’agoécologue complexifie le milieu afin que les services écosystémique puissent se substituer aux interventions humaines.

Ainsi défini le concept a une dimension universelle. L’agroécologie, c’est remplacer l’intervention par le service écosystémique.

Cela a directement deux conséquences :

⚡ réduction directe ou indirecte de la consommation d’énergie

🌿 aggradation des écosystèmes

D’où deux indicateurs, les dépenses d’intrants et la photosynthèse, qui permettent de déterminer si une mutation agroécologique est en cours sur un lieu donné. Par exemple, dans le cas du Sahel, avec une baisse des importations de céréales et un verdissement important, on peut tout à fait affirmer qu’on est sur le bon chemin !

Illustration : le domaine agroécologique des Peyrounels dans le Tarn : plantes prairiales pérennes, annuelles, boisement jeune et ancien sur un même lieu.

🌳🌱La végétalisation massive d’un territoire peut-elle en modifier le climat? 🌦️🌧️

Le cas du reverdissement massif du plateau de Loess, en Chine, se révèle instructif pour répondre à cette question. En effet, pour lutter contre l’érosion des sols, une zone d’une taille équivalente à la Belgique y a été massivement revégétalisée depuis les années 1980, sur la base d’une approche agroécologique (permaculture et agroforesterie). Les résultats y sont spectaculaires, tant en termes d’activité végétale que d’amélioration de la situation économique des paysans du territoire. Mais qu’en est-il en termes de pluviométrie, et donc de climat ?

Selon certaines études, l’accroissement de la surface végétalisée fait augmenter l’évapotranspiration dans la zone, et donc in fine la disponibilité en eau. Cette vision des choses se retrouve dans d’autres analyses consacrées aux liens entre végétation et eau. Selon cette approche, il ne faudrait pas trop favoriser la végétation, au risque d’assécher les cours d’eau d’un territoire.

Cependant, dans le cas du plateau de Loess, une étude récente “Revegetation Does Not Decrease Water Yield in the Loess Plateau of China” fait ressortir les points suivants:

  • L’apport en eau de surface ne diminue pas sur le plateau de Lœss après la revégétalisation.
  • L’augmentation plus rapide des précipitations régionales l’emporte sur l’évapotranspiration accrue.
  • La revégétalisation accélère le recyclage local de l’humidité et contribue à l’augmentation des précipitations.

Une autre étude “The role of ecosystem transpiration in creating alternate moisture regimes by influencing atmospheric moisture convergence” a été réalisée par Anastassia M. Makarieva (co-autrice de la théorie de la pompe biotique) et d’autres chercheurs. L’étude juge qu’”une fois qu’un stade plus humide est atteint, une végétation supplémentaire améliore la convergence de l’humidité atmosphérique et le rendement en eau.”
Dit autrement, la végétalisation massive d’un territoire peut conduire à en modifier sensiblement le climat, pour en améliorer la teneur en humidité.

Fort de ces constats, il apparaît que des politiques judicieuses de déploiement des techniques agroforestières et agroécologiques de grande ampleur permettraient de faire face aux processus de dessèchement en cours.

Les plantes consomment-elles de l’eau ?

Ces graphes remettent en cause une idée reçue ! Celle que les plantes consomment de l’eau.

Les plantes utilisent l’eau. Mais quelle que soit la saison, il y a plus d’humidité dans un sol couvert que dans un sol nu. 

C’est en tout cas ce qu’expose Russell Hedrick.

Il  montre les effets très positifs des couverts végétaux sur l’humidité des sols. On n’en doutait un peu, mais son travail sur le sujet qui est parfaitement objectivé par un système de mesures précises permet de confirmer l’intuition. 

Les écarts sont très net. Vous pouvez simplement comparer les deux graphes. La vidéo détaille  le protocole et l’arsenal utilisé. Ce travail permet aussi, de nuancer fortement le dogme du  sol couvert qui ne se réchauffe pas au printemps, c’est par ici:

👉  https://youtu.be/pE4TmCrLJvs?t=1084

Des mesures précises et un suivi régulier sont le préalable à des résultats sans équivoque 👏

Piloter son activité par des données objectives et se convaincre de la pertinence d’une nouvelle approche  ne nécessite pas forcément de gros moyens :

🥛quelques bon vieux pluvios/verres/seau/pot de fleurs/tubes qu’on relève chaque jours pour savoir où il pleut et combien. 

🌡️des thermomètres placés à des endroits stratégiques pour connaître la température au soleil, à l’ombre, sur et dans le sol.  

🎂un four et une ⚖️ balance pour évaluer l’humidité du sol et la matière sèche des plantes

 🚰 un bocal et une monte ⌚ pour tester sa structure du sol

🚸 des enfants pour compter les vers de terre

📖 un cahier pour noter ses résultats (ou un fichier Drive, pratique pour les graphs!)

Bien évidemment des outils de mesures perfectionnées et un encadrement scientifique, comme dans cette vidéo  facilitent la vie. Ils procurent des données étalonnées et précises. Ils évitent aussi d’avoir à solliciter le voisin chaque fois qu’on s’absente. 

Mais l’important n’est pas que les mesures soient exactes. C’est qu’elles soient réalisées au même moment pour toutes les modalités, répétées et reproductibles (ne pas hésiter à mesurer plusieurs fois pour évaluer l’intervalle de confiance et être critique sur son travail). 

Ainsi, on peut évaluer ce qu’on fait grâce à des critères objectifs et mettre en évidence leur bienfait, ou non, voire comme ici remettre en cause une idée reçue.

Reste maintenant à comprendre pourquoi malgré le besoin d’eau des plantes, leur présence favorise l’humidité des sols (et la dessus on a notre petite idée 😉) 

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