🌳 La garrigue, les pins et les chênes verts ne constituent pas la végétation méditerranéenne originelle. 🌳

L’image provient de: https://provence-alpes-cotedazur.com/que-faire/circuits/visite-massif-de-la-sainte-baume/

L’état de la forêt méditerranéenne fait débat. Ainsi, les historiens ne s’accordent pas pour quantifier l’impact de l’exploitation forestière durant l’antiquité.

L’excellent épisode “La terre s’est tue”, de l’émission LSD sur @France Culture, diffusée le 4 mars 2023, permet d’y voir plus clair grâce à deux des intervenants : Claire Delhon, archéobotaniste, et Jean-Paul Demoule, archéologue. En préambule, la notion “d’amnésie environnementale” est développée, signalant que les paysages européens qui nous semblent naturels ont tous été anthropisés.

On y apprend ensuite que des humains maîtrisant l’agriculture ont progressivement colonisé le sud de l’Europe, leurs pratiques agricoles transformant radicalement les paysages. Ils ont amené des ovins, domestiqués en territoires steppiques et consommé du bois. L’introduction de ces pratiques a transformé des forêts de feuillus en garrigues. En effet, les feuillus ne repoussaient pas assez vite après les coupes et le passage de troupeaux, laissant le champ libre à des espèces végétales plus appétentes pour le bétail, associées aux garrigues et aux chênes verts, qui eux font rapidement des rejets.

Les archéologues documentent cela via l’analyse de charbons de bois (anthracologie) trouvés sur les premiers sites d’installation néolithique. La prépondérance des feuillus est attestée pour tout le pourtour nord méditerranéen avant que la transition vers une végétation de garrigue se fasse au milieu du Néolithique.

Claire Delhon présente ensuite l’exemple de la forêt de la Sainte-Baume, à une trentaine de km de Marseille. On y trouve des feuillus, dont des hêtres dès 500 mètres d’altitude, alors qu’ils ne sont censés pousser qu’en haute montagne à cette latitude. Cet écosystème bénéficie avec le massif de la Sainte-Baume d’un barrage aux influences méditerranéennes. L’état de cette forêt s’explique aussi  par son caractère sacré, conservé à travers les siècles. Elle est d’ailleurs actuellement en réserve dirigée. Cette forêt bénéficie d’une litière épaisse et d’humus, le sol reste donc frais et humide. Elle garde ainsi son micro-climat forestier.

Néanmoins, cette forêt constitue un écosystème de feuillus fonctionnel, avec de nombreuses  jeunes pousses, notamment de hêtres, pourtant menacés par le changement climatique.Et cette forêt bénéficie d’une pluviométrie annuelle moyenne de 1.000 mm quand Marseille en reçoit la moitié. Ceci invite à repenser profondément l’aménagement du territoire.

Il n’est donc ni vain ni illusoire d’espérer inverser la tendance à l’aridification de la Méditerranée. Mais cela nécessite des efforts massifs, coordonnés et transfrontaliers. Nul doute que les citoyens seraient particulièrement enthousiasmés par la perspective d’un retour de forêts méditerranéennes denses et fonctionnelles. Des pistes complémentaires existent (voir notre article sur Jean Pain).